
Le Premier ministre Sébastien Lecornu, le 11 octobre 2025 à L'Haÿ-les-Roses ( POOL / Martin LELIEVRE )
Le Premier ministre reconduit Sébastien Lecornu devrait présenter mardi une première copie de son budget pour 2026 pour ralentir la dérive des comptes publics, laissant le soin au Parlement de surmonter ses divisions pour trouver un compromis.
Nommé dimanche soir "pour donner un budget à la France avant la fin de l'année", selon ses mots, le gouvernement Lecornu 2 tiendra mardi à 10H00 son premier conseil des ministres.
Un projet de budget pourra être présenté puis transmis à l'Assemblée nationale.
Le temps presse car le Parlement doit disposer, selon la Constitution, d'au moins 70 jours pour boucler cet examen budgétaire avant le 31 décembre. Sans quoi, une loi spéciale peut reconduire les crédits de 2025 à l'identique et les dépenses de l'Etat seraient gelées.
"Pas parfait", ce budget a été "plutôt imaginé aussi pour que le débat ait lieu", avait expliqué Sébastien Lecornu.

Le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, le 22 janvier 2025 à Davos ( AFP / FABRICE COFFRINI )
Jusqu'au bout, des tractations ont été menées pour tenter de rallier une majorité parlementaire et éviter la perspective d'une censure ou de nouvelles élections législatives anticipées.
Après s'être cristallisé sur la taxe Zucman sur le patrimoine des ultra-riches, réclamée par la gauche mais refusée par Lecornu, le débat s'est déplacé sur un autre terrain miné, celui des retraites.
- Trajectoire moins ambitieuse -
Le Parti socialiste réclame la suspension de la réforme fixant à 64 ans l'âge légal de départ, un point sur lequel le gouvernement s'est dit prêt à débattre. Mais cette perspective, qui coûterait au moins 3 milliards d'euros en 2027, fracture le camp présidentiel et rebute la droite comme le patronat.

Amélie de Montchalin le 16 avril 2025 à Paris, reconduite le 12 octobre à son poste de ministre de l'Action et des Comptes publics ( AFP / Ludovic MARIN )
"J'en ai vraiment assez de ce gâchis politique", s'est impatienté vendredi le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, appelant à des "compromis" et des "coalitions".
Faute de temps, le projet de budget pourrait être identique à celui que Sébastien Lecornu a envoyé le 2 octobre au Haut conseil des finances publiques (HCFP).
Ce dernier a déjà rendu un avis qui reste encore confidentiel, a indiqué son président Pierre Moscovici.
Certaines mesures, inspirées de la copie de l'ex-Premier ministre François Bayrou qui prévoyait un effort de 44 milliards d'euros, ont déjà été dévoilées: diminution du train de vie de l'Etat, baisse d'un impôt de production réclamé par les entreprises, taxe visant les holdings familiales parfois utilisées pour contourner l'impôt, maintien d'une contribution supplémentaire des hauts revenus.
Pour se donner de la marge en vue d'un compromis, Sébastien Lecornu a accepté de revoir à la baisse ses ambitions d'assainissement des finances publiques.
La zone d'atterrissage du déficit public est désormais projetée "en dessous de 5%" du produit intérieur brut (PIB) plutôt qu'à 4,7%.
Chaque dixième de point de pourcentage de déficit supplémentaire correspond à presque 3 milliards d'euros de dépenses supplémentaires.
- Coût de l'incertitude -
Cela complique la trajectoire du retour en 2029 à un déficit de maximum 3% autorisé par Bruxelles alors que la deuxième économie de la zone euro est déjà un cancre en la matière.

Le président du Medef Patrick Martin, le 24 septembre 2024 à Paris ( AFP / Alain JOCARD )
Cinquante ans après son dernier budget excédentaire, elle affichait en 2024 le pire déficit: 5,8% du PIB, soit "un trou" de quasi 170 milliards d'euros entre les dépenses et les recettes. Le déficit atteindrait 5,4% en 2025.
La dette est la plus importante derrière celles de la Grèce et de l'Italie (115,6% du PIB ou 3.416,3 milliards d'euros à fin juin).
Compliquant la donne, la croissance risque en outre d'être plus faible qu'anticipé en 2026, à 1% voire 0,9% au lieu de 1,2%, synonyme de moindres recettes fiscales.
La Banque de France estime à "au moins 0,2 point de croissance" le coût de la crise politique.
Elle "freine les décisions d'investissements, d'embauche et paralyse les agents économiques", a souligné le patron du Medef Patrick Martin dans le JDD dimanche.
La France paie aussi le prix de l'instabilité sur les marchés où elle emprunte plus cher depuis la dissolution de juin 2024, alourdissant le coût de la dette.
La charge d'intérêt, en passe de devenir le premier poste de dépenses de l'Etat, pourrait dépasser 70 milliards en 2026.
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